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10/10/2019

 

Les réseaux du détenteur du monde

 

Article écrit en 1846 par l’évêque Ignace Briantchaninov, qui est le véritable professeur de piété pour les chrétiens orthodoxes de l’époque moderne. Ses écrits sont fondés sur ceux des saints pères de l’Église Orientale, donc, de l’Église initiale, conservée et restée indemne. L’archimandrite s’adresse aux frères moines.

 

Sous le signe de la Sainte Croix, je vous conduis, frères, à un spectacle spirituel. Que notre chef soit Antoine, l’ermite égyptien, grand parmi les saints de Dieu.

 

Il vit jadis, par la révélation Divine, les filets du diable, étendus à travers le monde pour piéger les gens dans la perdition. Voyant que ces réseaux étaient innombrables, il s'écria au Seigneur en pleurant : « Seigneur ! Qui donc peut passer ces filets et parvenir au salut ? » (Paterik du Skite1, très digne père Dorotheus, homélie 2)

 

Je me plonge de pensée dans l'examen des réseaux du diable. Ils sont tendus à l'extérieur et à l'intérieur de l’être humain. Un réseau est étroitement connecté à un autre ; dans de certains endroits, les réseaux sont placés en plusieurs rangées ; dans d'autres, de larges ouvertures sont faites, qui mènent toutefois aux méandres plus nombreux, d’où il semble déjà impossible de s'affranchir. En regardant l’enchevêtrement ingénieux des réseaux, je pleure amèrement ! Involontairement, je répète la question de l’ermite béat : « Seigneur ! Qui peut s'affranchir de ces réseaux ? »

 

Les réseaux pour mon esprit sont disposés dans divers livres, s’appelant lumière, et contenant la doctrine des ténèbres, écrits sous l’influence explicite ou déguisée du détenteur du monde sombre et malfaisant, et dont la source est la raison endommagée par la chute, la tromperie des hommes, la malice pour leurrer (Éphésiens 4:14), selon les mots de l'apôtre, d'écrivains enflés d'un vain orgueil par ses pensées charnelles (Colossiens 2:18). Mon prochain, dans l'amour auquel je dois chercher le salut, devient pour moi un réseau qui m'attire en perdition lorsque son esprit est pris dans les filets de l'enseignement ou du raisonnement des trompeurs et flatteurs. Mon propre esprit porte les sceaux de la chute, est couvert du voile de ténèbres, contaminé par le poison du mensonge : trompé par le détenteur du monde, il place des filets pour lui-même. Au paradis déjà, il cherchait imprudemment et sans scrupules à acquérir la connaissance – désastreuse, meurtrière pour lui ! Après la chute, il devint encore plus imprudent, aveugle : il se délecte avec audace de la coupe de la connaissance empoisonnée et détruit ainsi, de façon décisive, le goût et le désir de la coupe Divine de la connaissance salvatrice.

 

Que de filets pour mon cœur ! Je vois des filets grossiers et fins. Lesquels d'entre eux puis-je appeler plus dangereux, plus effrayants ? Je suis perplexe. Le chasseur est habile, si quelqu'un échappe aux filets grossiers, il l’attrape dans les filets fins. La chasse aboutit toujours à la perdition. Les réseaux sont dissimulés de toutes les manières possibles avec l'habileté excellente. La chute est vêtue de toutes sortes de triomphes ; l’adulation, l’hypocrisie, la vanité - dans toutes sortes de vertus. La tromperie, l’illusion sombre prennent l'apparence du spirituel, céleste. L’amour affectif, souvent vicieux, est couvert de l'apparence extérieure du saint amour ; la douceur fausse, rêveuse, est présentée comme une douceur spirituelle. Le détenteur du monde essaie par tous les moyens de retenir l’homme dans sa nature déchue : et cela suffit, sans grands péchés, à rendre l’homme étranger à Dieu. Un péché explicite, comme le chasseur s'attend avec raison, est remplacé parfaitement par la présomption du chrétien qui se contente des vertus de la nature déchue et qui est tombé dans l'auto-illusion – et qui est devenu étranger au Christ.

 

Il y a tellement de filets pour le corps ! Et le corps, quel filet en soi ! Comment le possesseur du monde en fait usage ! À travers le corps, en condescendant à ses inclinations et à ses souhaits humiliants, nous nous assimilons aux muettes bêtes. Quel précipice ! Quel détachement, quel abandon de la ressemblance divine ! Nous nous plongeons dans cet abîme profond et terriblement éloigné de Dieu lorsque nous nous livrons à des plaisirs charnels grossiers, appelés, de par leur gravité pécheresse, les chutes. Mais les plaisirs charnels moins grossiers ne sont pas moins pernicieux. Pour eux, on délaisse le soin de l'âme, on oublie Dieu, le ciel, l'éternité, la destination de l'homme. Le détenteur du monde essaie de nous contenir dans le divertissement incessant, dans l'obscurcissement, à travers les plaisirs corporels ! À travers les sentiments, ces portes de l'âme par lesquelles elle communique avec le monde visible, il introduit dans l’âme le plaisir sensuel, indissociable du péché et de la captivité. La musique qui exprime et excite diverses passions, retentit dans des célèbres concerts terrestres ; ces passions sont représentées dans des théâtres terrestres et enflammées dans les amusements terrestres : l’humain est amené par tous les moyens possibles à jouir du mal qui l’avait tué. Enchanté par lui, il oublie la bonté Divine qui le sauve, et le sang de l'Homme-Dieu par lequel nous sommes rachetés.

 

Voici le faible croquis des filets posés par le détenteur du monde pour capturer les chrétiens. L’esquisse est faible, mais elle a dû vous faire horreur, frères, elle a dû engendrer la question dans votre âme : « Qui peut éviter ces filets ? »

 

Le tableau effrayant n'est pas encore terminé ! La Parole de Dieu encourage mon pinceau à peindre encore.

 

Que dit la Parole de Dieu ? Elle annonce une prédiction qui se réalise à nos yeux, selon laquelle, à la fin des temps, à cause de l’accroissement de l’iniquité, l’amour de beaucoup s’épuisera (Matthieu 24:12). La Parole de Dieu, sans mensonge, plus solide que le ciel et la terre, nous proclame la multiplication à la fin des temps des réseaux du diable et la multiplication du nombre de ceux qui périssent dans ces réseaux.

 

Exactement ! Je regarde le monde – je vois : les réseaux du diable se sont multipliés, en comparaison avec l'époque de la primitive Église du Christ, se sont multipliés à l'infini. Les livres contenant de fausses doctrines se sont multipliés ; les esprits contenant et disant aux autres de faux enseignements se sont multipliés ; les adeptes de la Sainte Vérité sont devenus très peu nombreux ; le respect pour les vertus naturelles, disponibles pour les juifs et les païens, accrut ; le respect pour les vertus directement païennes apparut, contraires à la nature elle-même qui les regarde comme le mal ; la perception des vertus chrétiennes a diminué, sans dire à quel point leur exécution réelle a diminué, presque disparu ; la vie matérielle est développée ; la vie spirituelle disparaît ; les plaisirs et les soucis corporels dévorent tout le temps ; on n'a même pas le temps de se souvenir de Dieu. Et tout cela devient un devoir, une loi. À cause de l’accroissement de l’iniquité, l’amour de beaucoup s’épuisera, même de ceux qui resteraient dans l’amour de Dieu si le mal n'était pas aussi universel, si les filets du diable n'étaient pas devenus innombrables.

 

La tristesse du béat Antoine était justifiée. La tristesse du chrétien des temps modernes est encore plus justifiée à la vue des réseaux du diable ; et voici la question pénible : « Seigneur ! Qui parmi les humains peut éviter ces filets et parvenir au salut ? »

 

Le Seigneur répondit à la question du très digne ascète : « La sagesse humble évite ces filets, et ils ne peuvent même pas la toucher. » 2

 

Réponse Divine ! Comment elle supprime tout doute du cœur, dépeint en quelques mots le moyen sûr de vaincre notre adversaire, le moyen de dissoudre, détruire ses nombreux artifices, arrangés avec l'aide de l'expérience malfaisante de longue date.

 

Protégeons nos esprits par l’humilité, ne lui permettons pas de vouloir acquérir inconsidérément les connaissances, même si la nouveauté et l’importance de leurs titres attirent notre curiosité. Préservons-le de l’épreuve des fausses doctrines couvertes par le nom et l'apparence de la doctrine chrétienne. Humilions-le en obéissance à l'Église, en écartant toute pensée qui s’élève contre l'esprit du Christ (2 Cor.10:5), contre l'esprit de l'Église. Au début, le chemin étroit de l'obéissance à l'Église afflige la raison, mais il conduit à la largeur et la liberté de la raison spirituelle qui fait disparaître toutes les incohérences imaginaires que la raison charnelle et affective trouve dans l'obéissance exacte à l'Église.3 Ne lui permettrons pas de lire sur les sujets spirituels rien d’autre que dans les livres écrits par les écrivains de la véritable Église, dont l'Église elle-même a témoigné qu'ils sont des organes du Saint-Esprit. Le lecteur des saints écrivains s'agrège discrètement à l’Esprit Saint qui vit en eux et qui parle à travers eux ; qui lit des écrivains hérétiques, même s’ils étaient décorés de surnom de saints par leur corporation hérétique, est agrégé à l’esprit maléfique de l’égarement (saint Pierre Damascène, Philocalie, partie I. À propos du raisonnement) : pour avoir désobéi à l’Église par fierté, il tombe dans les réseaux du détenteur du monde.

 

Quoi faire avec le cœur ? – Sur cet olivier sauvage, greffons un scion de l’olivier prolifique, greffons sur lui les propriétés du Christ, habituons-le à l'humilité évangélique, forçons-le à accepter la volonté de l'Évangile. En voyant son désaccord avec l’Évangile, sa contradiction constante, sa désobéissance à l’Évangile, nous verrons dans cette opposition, comme dans un miroir, notre chute. Quand nous verrons notre chute, nous la pleurerons devant le Seigneur, notre Créateur et Rédempteur, nous aurons le chagrin pour le salut ; resterons dans cette douleur jusqu'à ce que nous voyions notre guérison. Dieu ne dédaigne pas un cœur contrit et humble (Ps. 50:19), ne le livre pas à l'ennemi. Dieu est notre Créateur et notre Souverain : Il peut recréer notre cœur – et Il convertira le cœur qui Lui crie instamment avec les pleurs et la prière, du cœur qui aime le péché en cœur saint qui aime Dieu.

 

Surveillons nos sentiments corporels, ne laissons pas le péché entrer par eux dans la cellule de l’âme. Jugulons l’œil curieux et l’oreille curieuse ; bridons le membre du corps petit, mais produisant de forts chocs, notre langue ; humilions les aspirations muettes du corps par l’abstinence, la vigilance, le travail, des souvenirs fréquents de la mort, la prière attentive et constante. Comme les plaisirs corporels sont éphémères ! Ils se terminent par quelle fétidité ! Au contraire, un corps clôturé par l'abstinence et la préservation des sentiments, baigné dans les larmes du repentir, sanctifié par de fréquentes prières, est mystérieusement édifié en un temple de l’Esprit Saint qui rend vaines toutes les atteintes de l'ennemi à l'homme.

 

« La sagesse humble évite ces filets, et ils ne peuvent même pas la toucher. » Amen.

 

Article original Les réseaux du détenteur du monde

Traduit par Olga (TdR)

 

1 Paterik – recueil de dictons choisis des saints pères, des ascètes, ou de légendes de leur vie, ou des deux. Skite – petit monastère isolé dans une zone désertique, avec une charte de vie stricte, ou l’habitation d’ermites. Initiallement, c’était le nom d'un endroit désert en Egypte où l’ermitage a été fondé par le moine Macarius le Grand au 4ème siècle et a été détruit par les mahométans au 7ème siècle. [1]

La sagesse humble est la pauvreté spirituelle dont parle l’Évangile, Matthieu 5:3 et Luc 6:20. ( Dans le texte de Luc, la version française omet le mot d’esprit )

Les sages humbles se reconnaissent pécheurs, incapables de nul bien sans l'aide de Dieu, et pour toute chose, recourent avec la prière à Dieu, donateur de tout bien.

3  L’obéissance à l’Église du Christ, des apôtres et des saints pères. Ne pas confondre avec les autorités ecclésiastiques de nos jours, la caricature infâme qui fait partie intégrante de ce monde devenu juif.