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Un prophète du XIX siècle

Posté le 21/10/2020

Le XIX siècle ! L'anti-église étendit largement ses filets et répandit son poison partout, préparant les tempêtes du siècle suivant. L’homme sage du siècle, saint Ignace Briantchaninov, appelait déjà le monde faux (contrefait), c’est le mot qu’il a employé. Il disait que l’église chrétienne de son temps ressemblait à un arbre qui apparaissait encore grand et fort, mais était pourri à l’intérieur. La littérature classique russe en témoigne, et la littérature française décrit la perversion déjà bien avancée. Pour cette raison la lecture du roman « La peau de chagrin » d’Honoré de Balzac ne m'était pas à l'aise, parce que le roman est écrit dans la langue du siècle, ou plutôt, de l’époque moderne. Et c’est l’époque où le crime organisé est arrivé au pouvoir et les démons sont venus pour ainsi dire des entrailles de la terre à la surface. En effet, la conversation mondaine entre les convives lors du festin – la débauche, le premier désir accompli du personnage principal du roman – semble être un bavardage des démons. Comment décrire ce langage ? Ils insèrent sans cesse les mots « Dieu » et « diable » dans leur discours blasphématoire ; puis, comme en passant, avilissent ce qui se rapporte aux Écritures et le présentent comme marginal, de peu d'importance... L’anti-église mélange aux saletés tout ce qui est de vraie Église, tout en se déclarant élégante et savante. On peut dire que le jeune homme fut victime de ce langage perfide.

***

 

Le petit film sur la corneille en pâte à modeler [1] m’a motivé à prendre le livre de Pouchkine et relire Ruslan et Ludmila (et un pdf), le poème en six chants, avec une dédicace, une introduction et un épilogue. L’introduction du poème parle du chêne à l'anse près de la mer, une sirène est assise sur ses branches, et des choses miraculeuses se passent là-bas... un chat savant marche autour du chêne en racontant des chants et des contes ; Pouchkine les a entendus et relate un de ces contes.

 

Je ne gardais qu’un vague souvenir du poème. On « étudie » la littérature à l’école, mais les enfants peuvent-ils comprendre la littérature ? Les contes de Pouchkine ne sont pas des contes pour enfants, bien que les enfants les aiment. Et l’éducation établie par l’anti-église n'a pas pour but d’expliquer la vérité, mais de la cacher. Plus tard, je ne pouvais pas non plus voir le sens, étant au sein du tonneau étanche. Le film a servi d'indice. Oui, les auteurs ont crypté dans leur petit film le passé et l’avenir, mais ils suivaient Pouchkine... Dans « Ruslan et Ludmila », le poète a crypté le destin russe et chrétien.

 

L’action du poème commence à Kiev où Ruslan se marie avec Ludmila, la plus jeune fille du grand prince Vladimir. La nuit de noce à peine commencée, un sorcier, « le ravisseur ancien des beautés, le détenteur des montagnes de minuit », enlève Ludmila et l'emmène dans son domaine. Le grand prince Vladimir, en rage, demande qui ramènera sa fille ? « Moi », dit Ruslan malheureux, mais aussi ses rivaux se portent volontaires : Rogdaï belliqueux, Farlaf lâche, et le jeune khan khazar Ratmir.

 

Au début du chemin, Rogdaï, le rival belliciste, attaqua Ruslan, et le héros le vainquit au combat. Puis, chemin faisant, Ruslan rencontre le vieux sage Finn... qui l’aide à trouver sa jeune femme. Ruslan a sauvé Ludmila, mais elle dort d’un sommeil miraculeux. Et il entend la voix de sage Finn : « Courage, prince ! Un tonnerre céleste frappera le mal. Va à claire Kiev ; devant Vladimir, la jeune princesse se relèvera du sommeil envoûté ».

 

Sur le chemin du retour, Ruslan rencontre Ratmir qui vit dans un gîte nouveau : le jeune khan khazar, abandonnant son ancien but, trouva une nouvelle tendre amie. Ruslan reste brièvement chez Ratmir et puis poursuit son chemin.

 

Fatigué du long voyage, Ruslan s'endort aux pieds de Ludmila. Il a un rêve prophétique.
Ludmila est au-dessus d'un abîme terrible, elle y disparaît ; Ruslan se précipite après elle et voit : Vladimir est assis dans une grande salle, dans un cercle de bogatyrs aux cheveux blancs, parmi ses douze fils. Le vieux prince est toujours en colère, tout le monde se tait. Parmi les invités, Ruslan voit Rogdaï, tué par lui au combat, il est joyeux, il boit et ne regarde pas Ruslan stupéfié. Le jeune khan khazar est également présent ici, des amis et des ennemis... Et voilà, Farlaf entre dans la salle, il mène Ludmila par la main. Mais le vieux prince, silencieux et sombre, ne lève pas la tête triste...

 

La lune répand une lueur faible, un traître va à cheval. Ce traître est Farlaf qui jouit de la faveur de la sorcière Naïna. Et il plonge trois fois l'acier froid dans la poitrine du héros endormi. Il amena Ludmila à Kiev... mais elle dort toujours.

 

Ruslan gît noyé dans le sang. Le vieux sage Finn apparaît, avec deux pichets de l’eau prise de deux sources : l’un avec l’eau morte, l’autre avec l’eau vive. Il arrose le corps avec de l’eau morte, les blessures se sont refermées et le corps a fleuri de beauté. Ensuite, il l’arrose avec de l’eau vive, et Ruslan se relève, vigoureux, plein de forces neuves. Le vieux sage dit : « Le destin est accompli, mon fils ! Ta redoutable épée frappera, la paix douce descendra sur Kiev, et là, Ludmila te paraîtra. Prends cette bague d'alliance et touche avec lui le front de Ludmila, et la force des sorts secrets disparaîtra ».

 

Et c’est ce qui eut lieu, bien sûr.

 

La Vache du film La corneille en pâte à modeler correspond à Farlaf, et la Chienne à Ratmir (« douze filles m’ont aimé... » – douze tribus). Ces personnages représentent deux confessions majeures bâties par l’anti-église. Dans le poème, ils se réunissent au festin ; dans le film, ils se sont alignés dans l’exaltation « œcuméniste » sur une branche du tronc coupé  ensemble avec la corneille nominalement orthodoxe. Rogdaï représente la puissance belliqueuse qui se rapporte au 4e royaume et la 4e corne du livre de Daniel, chapitre 7 – et dans le film, c’est l’hippopotame.

 

Ludmila est un symbole de l’âme russe orthodoxe ou de l’âme chrétienne. La source de l’eau morte est l’Ancien Testament, la source de l’eau vive est le Nouveau Testament. La bague d’alliance à toucher le front de Ludmila, c’est la Nouvelle Alliance. Rappelez-vous « la fille n’est pas morte, mais dort » (Mt 9:24-25)

 

Rempli de sens spirituel, le poème resplendit d'une nouvelle vie. Alexandre Pouchkine a écrit le poème à l’âge de 21 ans, c’est incroyable. Il a ajouté la célèbre introduction 8 ans plus tard, en 1828.

 

Le poète était comme dans le camp ennemi. Il a soigneusement déguisé le sens spirituel de son œuvre, en l’appelant, dans la dédicace et dans le texte, un œuvre ludique consacré aux beautés, ou le bavardage pour divertir sa chère amie, ou bien des légendes des temps anciens ; il le cachait derrière des versets parfois intentionnellement légers, frivoles. Il se sentait dans un milieu hostile et avec raison : après cette pièce, il a été exilé vers le sud, ce qui est mentionné dans l'épilogue.

 

Alexandre Pouchkine était un prophète au sens propre, et son petit poème Prophète reflète la vérité. Il parlait du destin de l’âme russe orthodoxe, ou de l’âme chrétienne, dans le Conte du tsar Saltan, par sa Tatiana dans « Eugène Onéguine », et bien sûr, dans « Ruslan et Ludmila ». Et il a été tué comme prophète.

 

Donc, je connaissais seules les coques d’or du poème – les mots d’or de Pouchkine, et ne connaissais pas la pure émeraude mise dedans – le sens spirituel.

 

Руслан, лишился ты Людмилы;

Твой твердый дух теряет силы;

Но зла промчится быстрый миг:

На время рок тебя постиг.

С надеждой, верою веселой

Иди на всё, не унывай;

Вперед! мечом и грудью смелой

Свой путь на полночь пробивай.

 

Ruslan, Ludmila disparut

Et ton esprit ferme s’affaiblit.

Mais le moment du mal passera,

Le sort fatal est pour un temps.

Avec espoir, la foi joyeuse

Sois prêt à tout, et du courage !

Avec l'épée et la poitrine vaillante,

Avance ! Perce ta voie pour minuit.

 

 

Amicalement

Olga de TdR